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Il était une fois dans l'ouest... Shakespeare !
Comment faire découvrir et apprécier Shakespeare de manière ludique aux ados ? C'est le pari "involontairement" réussi par Vincent Caire et Gaël Colin, les metteurs en scène de "Beaucoup de bruit pour rien".*
Pour cela, prenez une des meilleures comédies de William, bien dosée en situations burlesques, en bons mots d'esprit populaires, en tirades à tiroirs et en tensions amoureuses, ajoutez-y un peu de musique façon Ennio Morricone, une transposition dans le Far West de l'après guerre de Sécession et une équipe de comédiens "copains comme cochons" qui, visiblement, s'en donnent à cœur joie pour interpréter cette farce mélo... et le tour est joué !
Tout de suite, l'ambiance est posée avec un décor de saloon et l'arrivée par la salle de Don Pedro, Claudio, Bénédick, de retour de la guerre... de Sécession. Ils seront les Yankees alors que le fourbe Don John, un sudiste. Sans abandonner la richesse et le rythme de la langue shakespearienne, tout s'enchaine comme dans un bon Western Spaghetti. De la petite fête où tous se déguisent en danseuses de revue au pastiche d'une bagarre de saloon, on s'attend presque à voir entrer Lucky Luke ou Terence Hill. Histoire d'ajouter un petit touche "façon Sergio Leone", les arrivées de Don John sont ponctuées des premières notes du thème mythique de "Il était une fois dans l'Ouest" (référence du western spaghetti sorti en 1968) et de la posture caricaturale adéquate.
Mais si le comique de la pièce est remarquablement retranscrit, l'intensité dramatique de celle-ci est préservée. Les ruptures sont d'ailleurs terriblement efficaces et nous rappelle que nous sommes bien dans une pièce de Shakespeare. C'est là véritablement que se trouve la réussite de l'adaptation et de la mise en scène, et l'efficacité du jeu énergique de l'ensemble des comédiens. Car à aucun moment, ils ne tombent dans la facilité et si le rythme est soutenu, voire "enlevé" (certaines scènes ont été raccourcis et certains personnages ont "disparus"), c'est toujours au service du verbe shakespearien, phrases à double sens et jeux de mots compris. Les comédiens, dont on apprécie la réelle complicité (ils se connaissent depuis treize ans), savent doser cette énergie qui les fait passer sans sourciller du burlesque à l'émotion dramatique. On notera d'ailleurs la prestation comique convaincante de Gaël Colin, Bénédick, et Tiphaine Vaur, Béatrice, qui vont aller crescendo d'acides échanges verbaux à de plus délicats penchants amoureux.
Vincent Caire, Gaël Colin et leurs acolytes prouvent avec talent et ingéniosité que l'écriture de Shakespeare est intemporelle et qu'un peu d'imagination peut la rendre accessible et ludique à tous, de 7 ans à 77 ans ! A voir de toute urgence... Dernière irrévocable le 13 novembre. Gil Chauveau
* Involontairement car cela n'était pas a priori leur intention de départ. Mais dans une salle composée à 50 % de lycéens, nous avons pu constater que le charme avait opéré et l'ensemble du public repartait conquis.
Cette pièce de Shakespeare fut adaptée et réalisée au cinéma par Kenneth Branagh en 1993 sous le titre original anglais "Much Ado about Nothing".
"Beaucoup de bruit pour rien"
(Vu le 20 octobre 2010)
Comédie de William Shakespeare.
Adaptation et mise en scène : Vincent Caire
et Gaël Colin.
Avec : Auguste Bruneau, Vincent Caire,
Damien Coden, Gaël Colin, Cédric Miele,
Mathilde Puget, Alexandre Tourneur et
Tiphaine Vaur.
Lumières : Marc Gingold.
Costumes : Corinne Rossi.
Décor et accessoires : Caroline Rossignol.
Jusqu'au 13 novembre 2010.
Du mercredi au samedi à 19 h.
Dimanche à 15 h.
Théâtre Le Ranelagh, Paris,
01 42 88 64 44.